Le colza et ses hôtes

Les champs de colza face au Mont-Blanc

Le mois de mars annonce le redémarrage de la végétation et des cultures. La belle couleur dorée du colza commence alors à envahir le paysage. Tout autour de nous, ces carrés jaunes amènent de la gaieté et annoncent le printemps.

La faune sauvage attends aussi avec impatience cette végétation luxuriante qui lui sert de « cachette ». Pour les chevreuils et autres mammifères, c’est un moyen de sortir un peu des forêts sans être vus. Ils n’hésitent pas à y rester plus tard dans la matinée et même à y dormir la nuit.

Le brocard dans le colza aux couleurs passées.

Bien souvent, ils empruntent les sillons marqués par les roues des tracteurs, dans lesquels on peut alors les démasquer. Il y a parfois aussi des zones de végétations moins denses, moins hautes, où les brocards se font repérer par leurs bois qui dépassent.

Démasqué!
La chevrette préfère les boutons d’or
Ses bois ont trahi sa présence
Le brocard traverse une partie du champ moins dense
Le lièvre démasqué 

Même le renard s’y cache et y sort furtivement sur la prairie sans s’éloigner trop de son échappatoire.

Le renard prudent, s’éloigne peu de sa cachette

Le colza est également un terrain de chasse pour de nombreux oiseaux. Ils s’installent sur les tiges les plus hautes pour y traquer les insectes volant au-dessus des fleurs. Le Tarier pâtre, petit passereau typique de nos campagnes, fait parti de ces oiseaux :

Le mâle:

La femelle, moins colorée:

Texte et photos: Gilbert Fortune

Fleur du moment : l’orchis singe

Le printemps est de retour, et avec lui, les magnifiques et envoûtantes orchidées. Elles étaient attendues avec impatience par tous les orchidophiles. Les premières à éclore sont l’orchis géant, l’orchis bouffon et l’orchis singe.
Nous allons nous intéresser plus particulièrement à celle-ci.

orchis singe

En effet, déjà son nom nous interpelle. De plus, sa floraison rose et blanche au-dessus de sa rosette de feuilles vertes attire la vue à cette époque ou les fleurs de couleur vive sont encore rares.

L’orchis singe (orchis simia) tient son nom à la forme de son labelle faisant penser à un petit singe. Elle a un casque pointu, rose-blanchâtre, moucheté de pourpre. Sa hauteur est de 20/40cm. Sa floraison est inversée : elle fleurit de haut en bas.

Elle peut être confondue avec l’orchis militaire (o.militaris).
Celle-ci a une floraison de bas en haut, son casque pointu n’est pas moucheté à l’extérieur et son labelle est moins fin.

Détail de la floraison de l’Orchis Singe
Orchis Singe: floraison de haut en bas
Détail de la floraison de l’Orchis Militaire
Orchis Militaire: floraison de bas en haut

On trouve l’orchis singe sur sol sec, calcaire sur les bords de chemins, dans les bois clairs, en zone de pelouses. C’est une espèce de lumière et mi-ombre assez répandue.

Vous pouvez l’observer, en ce moment, au marais de l’étournel et aux teppes de Verbois entre autres. Bien sûr, comme tout amoureux et protecteur de la nature, ne les cueillez pas ! Vous pouvez faire de belles photos si la lumière du soleil est bien là. Munissez vous d’une loupe et d’un livre sur la reconnaissance des orchidées pour mieux les déterminer. Et qui sait si la passion dévorante des orchidées ne vous contaminera pas !

Texte et photos: Jean-Loup Gaillard

Déambulations naturalistes au coeur du vallon de l’Allondon

Quelques semaines après avoir découvert ses sources, nous nous retrouvons, samedi 17 mai, pour explorer les richesses naturelles du vallon de l’Allondon, en Suisse, avec Stéphane Gardien. Ce site, géré par ProNatura GE, bénéficie du statut de réserve naturelle. Une protection indispensable pour préserver la flore et la faune exceptionnelles du site, notamment face à la pression de fréquentation en raison de la proximité de Genève.

L’Allondon est une rivière karstique qui prend sa source à Echenevex (voir sortie sur les sources de l’allondon). Son parcours, court et pentu, se termine dans le Rhône, à La Plaine. Au niveau du vallon, la dynamique naturelle de la rivière donne naissance à de magnifiques tresses, par érosion et dépôt de galets. L’eau est en effet une source d’énergie qui a de longue date été exploitée pour divers usages humains.

La rivière est, bien sûr, source de vie, avec une flore qui se répartit selon la présence plus ou moins proche d’eau, entrainant par la suite des cortèges variables d’animaux, d’où une répartition étagée des milieux naturels.
Dans le lit de la rivière, les plantes dites supérieures sont quasi absentes, hormis les phragmites qui poussent les pieds dans l’eau. La végétation pionnière des plages de galets est régulièrement balayée par les crues, ouvrant la voie à un nouveau cycle de colonisation.
L’Allondon est un milieu de vie et un couloir de déplacement pour de nombreux oiseaux d’eau comme le harle bièvre, espèce inféodée au bassin du Rhône dont nous observons une femelle dès le début de la sortie, et le martin-pêcheur, tous deux piscivores, ou encore le canard colvert. C’est également le royaume des poissons, amphibiens et libellules ainsi que du castor, qui a recolonisé le Rhône et ses affluents, depuis qu’il bénéficie d’une protection nationale.

La ripisylve, forêt de « bois tendres » toute proche de l’eau, est caractérisée par une végétation riche organisée en plusieurs strates :

  • Strate herbacée, avec par exemple le géranium herbe à Robert, l’alliaire, la benoite commune ou l’euphorbe des bois.
  • Strate arbustive abritant notamment le cornouiller sanguin, le noisetier, l’aubépine, le fusain et le troène.
  • Strate arborée dominée par les espèces supportant les inondations régulières telles que les aulnes (glutineux et blanc), divers saules et le frêne commun.
    Entre ces strates, nous découvrons aussi des lianes (houblon, lierre, vigne vierge) qui utilisent les ligneux comme support pour aller vers la lumière.
    Les oiseaux forestiers (rossignol philomèle, pinson des arbres, troglodyte mignon, etc.) se font discrets car ils sont occupés à nicher voire à nourrir leur progéniture.

Quelques pas plus haut, le visage de la forêt change avec des essences de « bois dur » qui ne supporteraient pas de voir leurs racines inondées. Nous traversons une chênaie – frênaie abritant également des érables, du charme, du pommier sauvage… mais aussi des espèces non indigènes voire envahissantes comme le robinier faux-acacia et le marronnier d’Inde.

En sortant de la partie forestière, nous découvrons les terrasses alluviales, avec une végétation rase adaptée à un sol peu épais, caillouteux donc drainant. Ce milieu, le mésobromion, tire son nom du brome dressé qui constitue la principale couverture végétale. La riche flore (origan, pâturin bulbeux, orpins, genêt des teinturiers, hélianthème à grandes fleurs) attire une entomofaune tout aussi riche, avec notamment de nombreux papillons et le spectaculaire ascalaphe soufré, hôte emblématique de ces prairies sèches.
Les orchidées étant en retard cette année, nos orchidophiles se trouvent quelque peu frustrés de devoir se contenter de quelques feuilles à peine sorties de terre…

En cette période de festival de Cannes, nous avons nous aussi joué les paparazzis pour les belles couleurs d’un couple de lézard à deux raies (ex-lézard vert) qui n’osait plus sortir de son rocher face à tant d’agitation !

Cette merveilleuse sortie a également été l’occasion d’ébauches de débat autour de questions existentielles : A quoi servent les papillons ? Les prairies existeraient-elles sans les hommes ?…

Le vallon de l’Allondon est tellement riche que nous sommes loin d’en avoir fait le tour en une matinée ! Rendez-vous en 2026 pour l’explorer depuis la chapelle de Malval. D’ici-là, n’hésitez pas à y retourner à toute saison. Vous pouvez aussi bénéficier des sorties gratuites proposées, tous les dimanches matins, par le Centre Nature du Vallon de l’Allondon géré par ProNatura GE.

Pour aller plus loin…
Vous pouvez télécharger la liste (non exhaustive) des espèces de flore et de faune observées au fil de notre balade:

Texte : Marjorie Lathuillière

Photos : Christine Holo, Marjorie Lathuillière

Voyage aux sources de l’Allondon

Nous nous retrouvons une dizaine, ce samedi 27 avril au matin, pour remonter le tout début du parcours de l’Allondon à l’air libre, jusqu’à sa source où nous retrouvons Jean Sesiano, hydrogéologue, pour découvrir quelques secrets de cette rivière emblématique du pays de Gex.

Chemin faisant, nous nous régalons du chant des oiseaux forestiers parmi lesquels diverses mésanges, le pinson des arbres, le troglodyte mignon, le rougegorge familier et bien d’autres ! La ripisylve qui nous offre son ombre et sa fraicheur (qui justifient bien quelques couches de vêtements !) est composée de frênes, d’aulnes et d’érables mais aussi, dès que l’on s’éloigne de quelques mètres de la rivière, de magnifiques hêtres. Au passage, Valérie nous fait déguster les pétioles frais et croquants de berce commune. L’idée d’une sortie gourmande en 2026 germe alors dans nos esprits…

A l’approche des sources de l’Allondon, nous retrouvons Jean Sesiano qui partage ses riches connaissances géologiques avec nous depuis quelques années.

L’Allondon fait partie des rivières du piémont (comme la Divonne, l’Annaz ou la Bouna) qui sont alimentées par les eaux circulant à l’intérieur du Jura. Ce matin, son débit est de 2 200 L/sec à l’entrée en Suisse (voir la veille hydro-météorologique du canton de Genève) contre environ 300 aux sources (voir vigicrues). L’Allondon est en effet alimentée, tout au long de son parcours, par de nombreux affluents tels que le Journans / Lion et l’Allemogne. Lors d’épisodes pluvieux, le débit monte à 9 000 L/sec voire de 20 000 L/sec.

Relief et principaux cours d’eau du pays de Gex (Géoportail)
Les sources de l’Allondon (Echenevex)

Les sources de l’Allondon se situent au niveau d’un affleurement calcaire datant du Crétacé inférieur (130-140 Millions d’années). Les fractures entrainant un décalage des couches horizontales laissent passer l’eau qui doit se frayer un chemin vers l’air libre quand elle arrive au niveau d’une couche imperméable.
Sur le calcaire profond (mis à jour par érosion) se trouvent des roches tertiaires chargées en calcaire (poudingues) puis des dépôts glaciaires, avec des éléments des Alpes voire du Jura.
Comme toutes les sources au pied du Jura, celles de l’Allondon ont été utilisées par l’homme. L’eau alimentait un moulin, d’où la présence d’un mur qui est parvenu jusqu’à nous, de même que les vestiges du bief qui recueillait l’eau.

Coupe géologique de l’affleurement des sources de l’Allondon

En 2022, une exploration spéléologique a été l’occasion de prélever des concrétions que Jean Sesiano a fait dater. La concrétion « N1 » (ci-dessous) s’est formée entre 113 000 ans et 47 000 ans. Par la suite, les conditions climatiques ont évolué, ne permettant plus la croissance des concrétions. Ces dates sont cohérentes avec celles obtenues pour la Bouna.

Concrétion N1 datant de
113 000 ans (± 6 400) au coeur et 47 000 ans (± 700) à l’extérieur

Un grand merci à Jean pour cette conférence en plein air sur l’histoire hydrogéologique de l’Allondon ! Pour aller plus loin, nous vous invitons à découvrir deux des livres de Jean :
. Curiosités géologiques autour du Léman
. Par monts et par vaux autour du Léman
Nous envisageons d’organiser un achat groupé donc si vous êtes intéressé.e, contactez-nous (marjo.lathuilliere@yahoo.fr) !

Texte et Photos : Marjorie Lathuillière