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Déambulations naturalistes au coeur du vallon de l’Allondon

Quelques semaines après avoir découvert ses sources, nous nous retrouvons, samedi 17 mai, pour explorer les richesses naturelles du vallon de l’Allondon, en Suisse, avec Stéphane Gardien. Ce site, géré par ProNatura GE, bénéficie du statut de réserve naturelle. Une protection indispensable pour préserver la flore et la faune exceptionnelles du site, notamment face à la pression de fréquentation en raison de la proximité de Genève.

L’Allondon est une rivière karstique qui prend sa source à Echenevex (voir sortie sur les sources de l’allondon). Son parcours, court et pentu, se termine dans le Rhône, à La Plaine. Au niveau du vallon, la dynamique naturelle de la rivière donne naissance à de magnifiques tresses, par érosion et dépôt de galets. L’eau est en effet une source d’énergie qui a de longue date été exploitée pour divers usages humains.

La rivière est, bien sûr, source de vie, avec une flore qui se répartit selon la présence plus ou moins proche d’eau, entrainant par la suite des cortèges variables d’animaux, d’où une répartition étagée des milieux naturels.
Dans le lit de la rivière, les plantes dites supérieures sont quasi absentes, hormis les phragmites qui poussent les pieds dans l’eau. La végétation pionnière des plages de galets est régulièrement balayée par les crues, ouvrant la voie à un nouveau cycle de colonisation.
L’Allondon est un milieu de vie et un couloir de déplacement pour de nombreux oiseaux d’eau comme le harle bièvre, espèce inféodée au bassin du Rhône dont nous observons une femelle dès le début de la sortie, et le martin-pêcheur, tous deux piscivores, ou encore le canard colvert. C’est également le royaume des poissons, amphibiens et libellules ainsi que du castor, qui a recolonisé le Rhône et ses affluents, depuis qu’il bénéficie d’une protection nationale.

La ripisylve, forêt de « bois tendres » toute proche de l’eau, est caractérisée par une végétation riche organisée en plusieurs strates :

  • Strate herbacée, avec par exemple le géranium herbe à Robert, l’alliaire, la benoite commune ou l’euphorbe des bois.
  • Strate arbustive abritant notamment le cornouiller sanguin, le noisetier, l’aubépine, le fusain et le troène.
  • Strate arborée dominée par les espèces supportant les inondations régulières telles que les aulnes (glutineux et blanc), divers saules et le frêne commun.
    Entre ces strates, nous découvrons aussi des lianes (houblon, lierre, vigne vierge) qui utilisent les ligneux comme support pour aller vers la lumière.
    Les oiseaux forestiers (rossignol philomèle, pinson des arbres, troglodyte mignon, etc.) se font discrets car ils sont occupés à nicher voire à nourrir leur progéniture.

Quelques pas plus haut, le visage de la forêt change avec des essences de « bois dur » qui ne supporteraient pas de voir leurs racines inondées. Nous traversons une chênaie – frênaie abritant également des érables, du charme, du pommier sauvage… mais aussi des espèces non indigènes voire envahissantes comme le robinier faux-acacia et le marronnier d’Inde.

En sortant de la partie forestière, nous découvrons les terrasses alluviales, avec une végétation rase adaptée à un sol peu épais, caillouteux donc drainant. Ce milieu, le mésobromion, tire son nom du brome dressé qui constitue la principale couverture végétale. La riche flore (origan, pâturin bulbeux, orpins, genêt des teinturiers, hélianthème à grandes fleurs) attire une entomofaune tout aussi riche, avec notamment de nombreux papillons et le spectaculaire ascalaphe soufré, hôte emblématique de ces prairies sèches.
Les orchidées étant en retard cette année, nos orchidophiles se trouvent quelque peu frustrés de devoir se contenter de quelques feuilles à peine sorties de terre…

En cette période de festival de Cannes, nous avons nous aussi joué les paparazzis pour les belles couleurs d’un couple de lézard à deux raies (ex-lézard vert) qui n’osait plus sortir de son rocher face à tant d’agitation !

Cette merveilleuse sortie a également été l’occasion d’ébauches de débat autour de questions existentielles : A quoi servent les papillons ? Les prairies existeraient-elles sans les hommes ?…

Le vallon de l’Allondon est tellement riche que nous sommes loin d’en avoir fait le tour en une matinée ! Rendez-vous en 2026 pour l’explorer depuis la chapelle de Malval. D’ici-là, n’hésitez pas à y retourner à toute saison. Vous pouvez aussi bénéficier des sorties gratuites proposées, tous les dimanches matins, par le Centre Nature du Vallon de l’Allondon géré par ProNatura GE.

Pour aller plus loin…
Vous pouvez télécharger la liste (non exhaustive) des espèces de flore et de faune observées au fil de notre balade:

Texte : Marjorie Lathuillière

Photos : Christine Holo, Marjorie Lathuillière

Voyage aux sources de l’Allondon

Nous nous retrouvons une dizaine, ce samedi 27 avril au matin, pour remonter le tout début du parcours de l’Allondon à l’air libre, jusqu’à sa source où nous retrouvons Jean Sesiano, hydrogéologue, pour découvrir quelques secrets de cette rivière emblématique du pays de Gex.

Chemin faisant, nous nous régalons du chant des oiseaux forestiers parmi lesquels diverses mésanges, le pinson des arbres, le troglodyte mignon, le rougegorge familier et bien d’autres ! La ripisylve qui nous offre son ombre et sa fraicheur (qui justifient bien quelques couches de vêtements !) est composée de frênes, d’aulnes et d’érables mais aussi, dès que l’on s’éloigne de quelques mètres de la rivière, de magnifiques hêtres. Au passage, Valérie nous fait déguster les pétioles frais et croquants de berce commune. L’idée d’une sortie gourmande en 2026 germe alors dans nos esprits…

A l’approche des sources de l’Allondon, nous retrouvons Jean Sesiano qui partage ses riches connaissances géologiques avec nous depuis quelques années.

L’Allondon fait partie des rivières du piémont (comme la Divonne, l’Annaz ou la Bouna) qui sont alimentées par les eaux circulant à l’intérieur du Jura. Ce matin, son débit est de 2 200 L/sec à l’entrée en Suisse (voir la veille hydro-météorologique du canton de Genève) contre environ 300 aux sources (voir vigicrues). L’Allondon est en effet alimentée, tout au long de son parcours, par de nombreux affluents tels que le Journans / Lion et l’Allemogne. Lors d’épisodes pluvieux, le débit monte à 9 000 L/sec voire de 20 000 L/sec.

Relief et principaux cours d’eau du pays de Gex (Géoportail)
Les sources de l’Allondon (Echenevex)

Les sources de l’Allondon se situent au niveau d’un affleurement calcaire datant du Crétacé inférieur (130-140 Millions d’années). Les fractures entrainant un décalage des couches horizontales laissent passer l’eau qui doit se frayer un chemin vers l’air libre quand elle arrive au niveau d’une couche imperméable.
Sur le calcaire profond (mis à jour par érosion) se trouvent des roches tertiaires chargées en calcaire (poudingues) puis des dépôts glaciaires, avec des éléments des Alpes voire du Jura.
Comme toutes les sources au pied du Jura, celles de l’Allondon ont été utilisées par l’homme. L’eau alimentait un moulin, d’où la présence d’un mur qui est parvenu jusqu’à nous, de même que les vestiges du bief qui recueillait l’eau.

Coupe géologique de l’affleurement des sources de l’Allondon

En 2022, une exploration spéléologique a été l’occasion de prélever des concrétions que Jean Sesiano a fait dater. La concrétion « N1 » (ci-dessous) s’est formée entre 113 000 ans et 47 000 ans. Par la suite, les conditions climatiques ont évolué, ne permettant plus la croissance des concrétions. Ces dates sont cohérentes avec celles obtenues pour la Bouna.

Concrétion N1 datant de
113 000 ans (± 6 400) au coeur et 47 000 ans (± 700) à l’extérieur

Un grand merci à Jean pour cette conférence en plein air sur l’histoire hydrogéologique de l’Allondon ! Pour aller plus loin, nous vous invitons à découvrir deux des livres de Jean :
. Curiosités géologiques autour du Léman
. Par monts et par vaux autour du Léman
Nous envisageons d’organiser un achat groupé donc si vous êtes intéressé.e, contactez-nous (marjo.lathuilliere@yahoo.fr) !

Texte et Photos : Marjorie Lathuillière

Voyage hydrogéologique et sensoriel sous le Jura

Après un premier report et une sortie en juin n’ayant pas permis au groupe de pénétrer dans le tunnel en raison des fortes pluies de la nuit précédente, nous étions une douzaine, samedi 7 septembre 2024, à longer le Rhône depuis le pont Carnot afin de rejoindre l’émergence de la Bouna, cette rivière souterraine à l’histoire insolite !

C’est au bord du Rhône et sous un temps radieux que Jean Sesiano, hydrogéologue à l’université de Genève, nous narre l’histoire de la Bouna, une rivière souterraine sortant de terre de façon artificielle pour se jeter dans le fleuve. En 1883, de fortes crues souterraines et superficielles poussent l’eau à se frayer un chemin à travers les blocs de moraine pour sortir à marche forcée. Conséquence : un glissement de terrain, sous Fort l’Ecluse, emportant la voie ferrée et bloquant momentanément le passage du Rhône ! Les humains ont tôt fait d’accuser la nature de faire des siennes. Surprenant, quand les datations de concrétions trouvées dans les galeries montrent que la Bouna était active depuis au moins 120 000 ans et qu’elle n’avait pas, dans les décennies du début du XIXème siècle et malgré des épisodes de fortes pluies, provoqué de tels glissements de terrain… Plus vraisemblablement, les travaux réalisés en 1858 pour la mise en service de la ligne Bellegarde – Genève ont sans doute omis de réaliser les drainages souterrains nécessaires pour faire face à ce genre d’aléas météorologiques.

Suite à l’incident de 1883, plusieurs galeries ont été creusées afin de retrouver la rivière souterraine dans le but de la canaliser et de la faire ressortir artificiellement. L’émergence a ainsi été trouvée dans une grotte sous le Jura, à hauteur du Col du Sac. Depuis, la Bouna se jette dans le Rhône, de façon plus ou moins intense en fonction de la pluviométrie, comme constaté lors de la première tentative de visite de la galerie en juin. De ces explorations souterraines restent plusieurs galeries dont les exutoires sont visibles depuis le chemin qui longe le Rhône.

C’est par ce chemin que nous regagnons l’entrée de la galerie principale d’où émerge la Bouna. L’occasion pour Jean de nous faire remarquer que la forêt qui se trouve à ce niveau est beaucoup plus jeune que celle des environs, en raison du glissement de terrain de 1883.

Nous empruntons la galerie artificielle jusqu’à rejoindre la galerie naturelle, creusée par l’eau entre les blocs de moraine. A gauche, vers le nord, nous ne ferons qu’observer le début d’une galerie principalement inondée. A droite, une autre galerie rejoint les divers exutoires observés depuis le chemin longeant le Rhône. Une exploration que certain.es rêvent d’entreprendre une autre fois…

Sous terre, c’est un véritable festival pour nos sens : les joyaux résultant du travail de l’eau et du calcaire, le clapotis de l’eau et nos propres pas dans le filet d’eau qui coule au sol, la fraicheur de ce monde souterrain… Et avant de retrouver la lumière du jour, c’est l’ozone, absent dans l’obscurité de la galerie, qui vient titiller nos narines.

C’est “notre” Jean (Romand-Monnier) qui, lors de la première sortie de juin, a remarqué l’inversion, sur ce schéma de l’article sur la Bouna, entre les résultats de datation du cœur des concrétions calcaires et ceux de la périphérie.

Un grand merci à Jean Sesiano pour cette découverte exceptionnelle ! Pour tout savoir sur l’histoire de la Bouna et les études réalisées par Jean et son équipe, lisez l’article qui leur est consacré.

Marjorie Lathuillière

Le ballet des papillons de nuit

Après déjà 2 reports pour cause de pluie battante, nous avons décidé de maintenir notre sortie papillons de nuit le samedi 24 août malgré une météo annoncée plutôt mitigée.

Au départ du parking du Mont Mourex, Stéphane Gardien, notre guide pour cette sortie, est lourdement chargé de livres spécialisés, boites de collecte d’insectes et lampe à UV : le matériel dont nous aurons besoin pour attirer puis identifier les papillons parmi les quelques 5’500 hétérocères (c’est-à-dire les espèces de papillons de nuit) vivant en France !

Nous apprenons d’ailleurs à cette occasion que les papillons de jour, eux, ne sont que 20 fois moins soit 250 espèces environ…et sont beaucoup mieux connus que leurs compères nocturnes.

Nous cheminons dans la prairie sèche, traversons quelques ronces et arrivons vers un espace parsemé d’arbres que Stéphane juge utiles pour nous protéger du vent – car les papillons n’aiment pas du tout le vent-, tout en étant suffisamment ouvert pour nous permettre d’installer une lampe à UV spéciale et un drap sur lequel viendront se poser les insectes nocturnes attirés par la lumière ultraviolette.

Belle surprise : une jolie mante religieuse qui apporte ses airs d’alien à notre soirée.

Première épreuve de la soirée : Stéphane teste nos connaissances sur les insectes et la classification des différentes espèces : une araignée est-elle un insecte ? une fourmi ? et une mouche ?

(petit rappel : on estime qu’il existe 3 à 8 millions d’espèces d’insectes dans le monde et c’est le groupe d’animaux le plus diversifié sur Terre. Un insecte a un corps en 3 parties distinctes – tête, thorax et abdomen, 6 pattes articulées, souvent mais pas toujours des ailes, des antennes et un exosquelette).

C’est l’occasion de réviser nos lointaines notions de grec et de latin qui se révèlent toujours utiles pour se repérer entre les :

  • Les diptères (mouches, moustiques) avec leurs 2 ailes,
  • Les hyménoptères (abeilles, guêpes, fourmis) et leurs ailes membranées,
  • Les coléoptères (scarabées, coccinelles ou hannetons) avec leurs ailes en fourreau,
  • Les orthoptères (grillons, sauterelles et criquets) et leurs ailes droites
  • Ou encore les lépidoptères (les papillons) et leurs ailes à écailles qui sont les stars de notre soirée.

Guidés par Stéphane, nous retraçons ensuite les 4 stades du cycle de la vie de nos lépidoptères : les œufs, la chenille (larve), la chrysalide (nymphe), et le papillon adulte (imago) qui apparait après sa fameuse métamorphose.

Nous piqueniquons en attendant la tombée de la nuit, avec une dégustation de tomates cerises de Patrick, du gâteau au chocolat de Tamara ou de la tarte aux prunes de Jean-Christophe.

Le vent s’est malheureusement levé et les conditions ne sont pas les meilleures pour les papillons…néanmoins, nous commençons à voir se poser différents insectes sur le drap posé autour de la lampe.

Deuxième épreuve : aller délicatement collecter chaque insecte dans un flacon transparent puis le ramener vers le groupe.

Troisième épreuve : procéder à l’identification du papillon, grâce aux livres de Stéphane et surtout à sa grande connaissance des espèces. S’agit-il d’un papillon de la famille des géomètres, des écailles, des noctuelles, des drépanes ou des bombyx ?

Nous sommes surpris par la variété des formes d’ailes, d’antennes (les papillons de nuit étaient autrefois appelés hétérocères ce qui signifie “antennes de formes différentes”) et de couleurs : la Citronnelle rouillée toute de jaune vêtue, la pyrale du buis toute jolie en noir et blanc, la noctuelle du coudrier beaucoup plus sobre en brun, le Crambus des chaumes avec son nez pointu, L’Hameçon avec sa coloration ocre orangée sans compter la zeuzère du poirier qui a des airs de petit poisson volant argenté.

Zeuzère du poirier

La pluie menace…nous relâchons les papillons et sommes obligés de plier bagage et de battre en retraite mais nous avons tout de même pu identifier plus de 19 espèces différentes de papillons de nuit !

Sortie orchidées le samedi 1er juin 2024

Samedi 1er juin à 9h30, 13 personnes se sont retrouvées sur le parking du centre de Champfromier (Ain).

Le temps était gris et incertain mais 2-3 rayons de soleil sont apparus l’après-midi. La sortie avait pour thème les orchidées et était animée par Stéphane Gardien, naturaliste local bien connu.

Il nous a dévoilé le déroulé de la journée avec la visite de 3 secteurs différents aux alentours immédiats de Champfromier.

Cette année humide et pluvieuse favorise la prolifération et l’éclosion des orchidées. Nous en avons dénombré 16 espèces.

Ce secteur, de par sa formation calcaire, est l’un des endroits (sinon l’endroit) du département où il y en a le plus dans un périmètre restreint.

Stéphane nous a montré comment déterminer les différentes espèces en observant (à la loupe si besoin) leur feuillage et leurs inflorescences.

orchis pyramidale

Il aussi attiré notre attention sur plusieurs sortes de papillons ainsi que sur les chants d’oiseaux. Le pouillot de Bonelli nous a accompagné encore tout au long de cette sortie.

Le midi, nous avons effectué une pause pique-nique bienvenue. Ce fut très convivial et riche en échanges. La journée découverte s’est achevée vers 15h.

Le groupe était à l’écoute, curieux de savoir et de découverte, posant de nombreuses questions. Chacun a amené ses connaissances dans un domaine ou l’autre.

Stéphane Gardien a captivé son auditoire. Ses connaissances très larges du milieu naturel lui ont permis, en plus des orchidées, de parler des autres plantes, des papillons, des araignées rencontrés, ainsi que l’identification des chants d’oiseaux. Stéphane a été simple d’accès avec des explications claires et très imagées. Son humour a déteint sur le groupe et fait passer une agréable journée.

Liste des orchidées vues lors de la sortie :

Grande listère – ophrys mouche – platanthère à 2 feuilles – orchis tachetée – orchis moustique – orchis militaire – orchis pyramidale – orchis mâle – homme pendu – orchis singe – néottie nid d’oiseau – orchis bouc – céphalanthère à longues feuilles – épipactis rouge – ophrys abeille – céphalanthère damasium.

Texte et photos orchidées : Jean- Loup Gaillard

Photo de groupe : Marjorie Lathuilliere